Le 24 octobre dernier, nous avons reçu Gaultier Bès, cofondateur de la revue Limite pour son dernier livre, Nos Futurs (ed. de l’Escargot). Il y propose une grande synthèse personnelle de l’évolution des problèmes écologiques, sociaux et moraux de notre temps. En partant d’un christianisme écologique, Bès pose un diagnostic à la fois personnel et théorique, puisé dans ses “années Limite” autant que dans son quotidien à l’éco-hameau de la Bénisson-Dieu. Face aux incertitudes du temps, il montre que quatre adversaires se mettent en ordre de bataille : déni, complotisme, technosolutionnisme et survivalisme. Il fustige ces tentatives de neutraliser l’avenir en entretenant l’illusion de la maîtrise. Nous avons discuté avec lui de cette analyse, mais aussi des débats des dix dernières années autour de l’écologie chrétienne et de son caractère potentiellement conservateur ou réac. Le public très nombreux a pu poser des questions.
En avant-goût du podcast, voici deux extraits rédigés.
« J’ai des amis complotistes. Il est frappant de voir que ce n’est jamais un système de production et répartition des richesses qui est mis en cause, mais des puissances machiavéliques, démoniaques. On peut analyser beaucoup plus simplement le techno-capitalisme mondialisé comme un processus d’accumulation de richesses où le mensonge et la manipulation sont autorisés. Je crois beaucoup plus aux effets d’aubaine du capitalisme qu’à l’intentionnalité fourbe, malveillante que la rhétorique complotiste place. Il faut répondre aux discours fatalistes, pessimistes. Nous sommes déterminés et contraints par nos limites mais il y a toujours une marge d’action. Le discours qui consiste à dire tout est foutu car tout est prévu, le plan va s’appliquer, dépolitise complètement la réaction. Il déplace l’attention des causes socioéconomiques à des individualités malveillantes. »
« Le terme d’écologie intégrale a une histoire disputée. Pour moi, c’est tout simplement l’articulation entre les différentes dimensions de l’existence humaine, et notamment la dimension strictement écologique et la dimension sociale, mais aussi les dimensions spirituelles et morales. On peut aussi définir l’écologie intégrale comme une quadruple relation : relation à soi-même, aux autres, au vivant non-humain, et relation à Dieu. On est là bien loin des définitions de l’écologie qui ne l’abordent qu’à partir par exemple du prisme énergétique, ou d’un prisme technique. »