Le complotisme semble se massifier ces dernières années, notamment depuis la crise sanitaire. Il divise les familles et la société, entre des clans irréconciliables, et empêche toute discussion. Politiquement, il nourrit une impasse et ne permet aucune lutte émancipatrice. Il est poreux avec l’antisémitisme, la désignation de boucs émissaires, le fascisme… À côté d’un complotisme d’extrême droite, on assiste à une diffusion préoccupante d’un complotisme d’extrême gauche. Notre époque paraît perdue, confuse, en mal d’idéologies politiques claires, émancipatrices et mobilisatrices.
Pourtant, le complotisme paraît naître de désirs légitimes : celui de comprendre notre monde et d’avoir une prise sur notre environnement, de s’opposer aux intérêts privés qui captent les ressources communes et aliènent les travailleur·se·s. Comment distinguer entre les discours critiques du pouvoir et le complotisme ? Comment combattre le complotisme tout en luttant pour la justice sociale et la démocratie ?
Il paraît nécessaire de comprendre les causes du complotisme, son histoire politique et les logiques politiques qui le suscitent. Il faudra aussi se demander quelle idéologie politique il construit, et qui fabrique ces discours. À qui profite le complotisme ?
Nous échangerons avec Marie Peltier, historienne et spécialiste du complotisme. Elle a notamment travaillé sur la propagande de guerre de Bachar el-Assad. Elle a publié L’ère du complotisme : la maladie d’une société fracturée, Paris, Les petits matins, 3 octobre 2016 et Obsession : dans les coulisses du récit complotiste, Paris, éditions Inculte, 3 octobre 2018.